Guy Môquet - la guerre des mémoires

mercredi 24 octobre 2007 , par Co dans VIDEOS DE TV BRUITS


Lors d’un discours en hommage aux martyrs de la Résistance, Nicolas Sarkozy, alors en pleine campagne électorale, avait évoqué le martyr Guy Môquet, résistant communiste. Il avait déclaré qu’une fois élu, il souhaitait que la dernière lettre de Guy Môquet soit lu dans tous les lycées de France le 22 octobre, date anniversaire de son exécution. Le Parti Communiste Français a alors répondu par un ensemble d’hommages et de publications pour rappeler "Qui était vraiment Guy Môquet ?". Mais cette querelle des mémoires est-elle si nouvelle ? ...

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Guy Môquet - La guerre des mémoires

Si tu n’as rien compris à cette vidéo, tu peux lire ceci :

1 _ Les faits

Guy Môquet est le fils de Prosper Môquet, militant syndical, qui est élu en 1936 député communiste des Epinettes (Paris). Il partipe avec son père aux occupations d’usines de 1936. Quand la guerre arrive son père est emprisonné. Guy entre dans la Résistance et organise les Jeunesses communistes clandestines dans le 17ème arrondissement. Il est arrété le 13 octobre 1941 à la gare de l’Est. Il est interné à la Santé pour terminer au camp de Châteaubriand (44).

Le 20 octobre 1941, le lieutenant-colonel Holtz est assassiné à Nantes par un groupe de résistants. Aussitôt le général Stülpnagel à Paris avec Hitler à Berlin ordonnent de fusiller 50 otages en représaille. Les 50 fusillés sont désignés par le sous-préfet de Châteaubriand et surtout Pierre Pucheu, le ministre de l’intérieur de Pétain. Celui-ci est un représentant du Comité des forges, groupe de pression de grands industriels de la sidérurgie (un ancêtre du MEDEF). Il choisit parmis les 50 otages, 27 des prisonniers politiques du camps de Châteaubriand, ils sont quasiment tous communistes, dont le jeune Guy Môquet.

2 _ La mémoire

Lors d’un colloque sur les identités régionales pendant la Seconde Guerre Mondiale en 2001, Didier Guyvarc’h consacrait un chapitre aux 50 otages dans la mémoire nantaise. Celui-ci décrit comment dès la fin de la guerre 2 lieux de mémoire se sont constitués. D’une part le PCF commémorait "les 27 de Châteaubriand" à la Sablière (lieu de l’exécution), d’autre part la droite nantaise et les gaullistes parlaient "des 50 otages de Nantes". Chaque lieu reçut son monument. Les communistes profitaient de chaque célebration pour dénoncer le réarmement de l’Allemagne, les guerres coloniales ou le retour de vichystes au gouvernement. La droite nantaise célébrait ces martyrs pour mieux faire oublier le passé collaborationniste de certains de ces membres. Les 50 otages étaient des patriotes morts pour la France à cause de la barbarie nazie.

En voulant faire lire la dernière lettre de Guy Môquet aux lycéens de France, N. Sarkozy relance donc une vieille querelle des mémoires de plus de 60 ans. Il choisit soigneusement une lettre d’adieu qui ne fait absolument pas part de l’engagement politique du résistant. Il utilise cette lettre comme la lettre d’un patriote français qui se sacrifie pour son pays. Le Parti Communiste rappelle aujourd’hui la véritable histoire de Guy Môquet, histoire que le parti a toujours voulu posséder.

Il est paradoxal qu’un résistant communiste serve de propagande à un gouvernement de droite. Denis Kessler, membre éminent du MEDEF (un fils spirituel de Pierre Pucheu) décrivait ainsi l’action du gouvernement "...il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945 et de défaire méthodiquement le programme du Conseil National de la Résistance." [Challenge - septembre 2007]

Sources :

extrait : La dernière lettre de Guy Môquet

extrait : Poéme de Guy Môquet trouvé lors de son arrestation

Hommage à Guy Môquet par l’IRHS (Institut régional d’histoire sociale), la CGT et le PCF le jeudi 18 octobre 2007 à Toulouse.

Hommage aux martyrs de la Résistance, discours de Nicolas Sarkozy le 16 mai 2007 au bois de Boulogne.

Bretagne et identités régionales pendant la Seconde Guerre mondiale, colloque internationale du 15 au 17 novembre 2001, sous la direction de Christian bougeard, Université de Bretagne Occidentale.
extrait "Les 50 otages dans la mémoire nantaise" Didier Guyvarc’h, p 381-392, IUFM de bretagne/CHRISCO/Rennes 2

musique : La marseillaise

Le chant des partisans

Certaines images sont tirées du numéro spécial de l’Humanité du 3 octobre 2007 "Qui était vraiment Guy Môquet"

Aussi :
Gérard Namer, La commémoration en France, 1944-1982, SPAG,
1983

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8 commentaires

  • Guy Môquet - la guerre des mémoires

    par Noël BOUVET 1er décembre 2007 12:40

    Les communistes français ont la mémoire courte !

    Guy Môquet a été arrêté en distribuant des tracts communistes en octobre 1940. En ce temps-là, Staline et Hitler étaient alliés. Ils avaient les mêmes goûts pour les uniformes militaires et venaient de se partager la Pologne. Quant aux communistes français, ils suivaient les directives de Moscou. Guy Môquet n’a pas été arrêté pour un fait de Résistance mais pour la distribution de tracts en faveur d’un parti politique interdit en raison de sabotages en temps de guerre en 1939.

    En juin 1941, Staline et Hitler se séparèrent, les communistes devinrent alors des Résistants, à part entière, et luttèrent contre le Parti National Socialiste des Travailleurs Allemands (NSDAP). Ce dernier fut aussi appelé parti nazi ou parti fasciste de nos jours pour faire oublier le mot socialiste ! Via l’armée allemande, il occupa la France avec la collaboration, entre autres, de Pierre Laval, ancien avocat de la CGT, ancien sénateur socialiste (SFIO), inventeur des Assurances Sociales (ancêtre de la Sécurité Sociale), des coopératives, de nos régions économiques actuelles, etc.

    En octobre 1941, trois résistants communistes assassinèrent le lieutenant-colonel Holtz. En représailles, 48 otages furent exécutés. La plupart étaient communistes, dont Guy Môquet. Les auteurs de l’assassinat eurent peut-être la lâcheté de ne pas se dénoncer, pour éviter qu’un grand nombre de camarades innocents périssent à leur place ? Mais, vraisemblablement, leurs commanditaires les dissuadèrent de le faire, car leur but était de créer une réaction politique dans la population française.

    S’il vous plaît n’écrivez pas que :

    - Guy Môquet était un résistant, il était simplement militant communiste et le Parti Communiste Français ne se manifestait pas encore contre l’occupation allemande, lorsque Guy Môquet fut arrêté.

    - Le Parti Communiste a lutté contre le retour de vichystes au gouvernement.

    Il a favorisé par deux fois l’élection présidentielle de François Miterrand. Durant la Guerre, ce dernier avait participé aux gouvernements mis en place par Pétain, fut décoré de la Francisque des mains même du maréchal. D’autre part, il fut le Garde des Sceaux en 1956-1957 de Guy Mollet (SFIO). Il assista à la décapitation de 58 patriotes algériens dont il avait fait refuser la grâce présidentielle. L’un d’entre eux était le Secrétaire du Parti Communiste Algérien.

    Noël Bouvet

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    • Guy Môquet - la guerre des mémoires

      par alex 1er décembre 2007 16:39

      parce qu’on ne peut pas être militant "quelque chose" et résistant "à sa façon" ? Est-ce si incompatible ?

      Quand à la libération de Toulouse, les FTP-MOI ont vu le grand nombre de résistants rentrant du maquis, ils ont pensé que s’ils avaient été aussi nombreux en ville, les nazis et les collaborationnistes ne seraient certainement pas restés aussi longtemps en ville.
      A ce sujet voir l’excellent documentaire : <a
      href="http://catalogue.bibliothequedetoulouse.fr/uhtbin/cgisirsi.exe/rvd2kxoc3r/CABANIS/301700006/9" >Ni travail, ni famille, ni patrie

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    • Guy Môquet - la guerre des mémoires

      par co 3 décembre 2007 17:06

      Les communistes, les communistes, c’est pas beau de s’en prendre a une espèce en voie d’extinction à l’heure de la protection de la biodiversité. Et même si l’adage "stalinien un jour, stalinien toujours" ne me parait pas infonder je vais devoir défendre les camarades.

      Guy Môquet s’est fait arrété le 13 octobre 1941 à la gare de l’Est car il distribuait des tracts pour le Parti Communiste, plus précisemment pour les Jeunesses communistes clandestines, qu’il organisait alors dans le 17ème arrondissement de Paris. Je considère cela comme un acte de Résistance. La rédaction, l’impression et la diffusion de tracts interdits ont constitués la majeure partie de l’activité de la Résistance. Les assassinats, les dynamitages et autres c’est surtout dans les films, quantitativement ils ont été très faibles.

      Dire "Quant aux communistes français, ils suivaient les directives de Moscou. " c’est assez réducteur. La direction du parti c’est vrai. Pour les militants de base, un certain nombre a pris le maquis dès 1940 et beaucoup se sont d’ailleurs fait exclure du PC pour cela (jusqu’en 1941).

      Le Parti Communiste a lutté contre le retour de vichystes au gouvernement. Il est vrai que cette phrase est en partie fausse pour ce que vous avez évoqué plus haut. Néanmoins il est vrai que lors des discours prononcés chaque année à la Sablière (près de Châteaubriand lieu de l’exécution des ôtages), le PC profitait de cette commémoration pour en faire une tribune politique. Ils dénonçaient alors les guerres coloniales, le réarmement de l’Allemagne et le retour de vichystes au gouvernement. Que ces discours soient en contradiction avec l’action concréte du PC est un autre problème.

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      • Guy Môquet - la guerre des mémoires

        par Noël BOUVET 16 décembre 2007 14:32

        Vous avez raison, les communistes forment une espèce en voie de disparition en France, la raison est qu’ils ne suivent plus les directives de Moscou, et ne reçoivent plus de financement du grand frère russe.

        Le socialisme soviétique a cessé de fonctionner depuis une douzaine d’années en URSS, le pays inventeur du communisme, la raison est l’explosion de la communication à travers le monde : les peuples de l’Union des Républiques Socialistes et Soviètiques ne pouvaient plus croire aux mensonges de leurs dirigeants. Le Parti national-socialisme des travailleurs allemands (NSDAP) plus connu sous le nom de Parti Nazi a fort heureusement disparu depuis plus de 60 ans. Ces deux partis, tous deux dérivés du Socialisme, se resemblaient fort par leur dictature, les uniformes de leurs leaders Hitler et Staline, leur impérialisme : ils envahire conjointement la Pologne. Leurs crimes se chiffrent par plusieurs dizaines de millions de cadavres.

        Guy Môquet, n’a jamais été Résistant. Il s’est fait arrêter en distribuant des tracts en octobre 1940. Ces tracts ne préconisaient pas la Résistance contre l’occupant allemand, mais l’établissement d’un système communiste en France. Pucheu, qui faisait fonction de Ministre de l’Intérieur à l’époque sous la houlette de Pétain n’a jamais désigné Guy Môquet comme otage. Les listes présentées par de La Rozière et établies par Chassagne (Hauts fonctionnaires dépendant de Pucheu) ne mentionnaient pas son nom. Ce sont les Allemands qui complétèrent les listes.

        La responsabilité de la mort de Guy Môquet n’incombe pas au gouvernement de Vichy mais aux commanditaires du meurtre de Hotz et aux nazis pour qui des représailles sanglantes étaient indispensables.

        Malheureusement, les communistes français actuels doivent se rappeler que le Parti Communiste français fut interdit dés 1939 sous le gouvernement Daladier pour cause de démoralisation des troupes en état de guerre et de propagande larvée pour des actes de sabotage. Ce n’est que durant le printemps 1941, lorsque Hitler et Staline se brouillèrent que les communistes français devinrent des Résistants héroïques. Leurs dirigeants suivaient les directives de Moscou. Staline désirait à l’époque l’établissement d’un second front. En ce qui me concerne les hommes d’action communistes, comme Guisco, Bourdarias et Brustlein qui exécutèrent Hotz, étaient sincères. Mais, les dirigeants du PC français ne faisaient que suivre les consignes de Staline et consorts.

        Noël Bouvet

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        • 50 otages - 2 sauvés par les avocats Guinaudeau et Martineau

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          • j’avais entendu parler du cabinet d’avocat Guinaudeau seulement, je suppose que l’avocat nommé Martineau est celui qui était batônnier ?

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            • Guy Môquet - la guerre des mémoires

              par guardabarranco@gmx.fr 1er avril 2010 08:20

              Bonjour
              Oui l’avocat Martineau devenu par la suite batonnier a sauvé un des otages Ridel qui bien après la libération se rendait chaque année rendre visite à maître Martineau

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          • Guy Môquet - la guerre des mémoires

            par kia 3 juin 2010 19:21

            @Noel Bouvet
            Vous avez certainement raison mais toutefois il n’est pas inutile de préciser que Guy Moquet était le fils de Proper Moquet, député communiste déchu.
            Les Avocats de la défense Maîtres Martineau et Lerat avec Me Guinaudeau, bâtonnier à Nantes, ont fait libérer Fernand Ridel et Dauget, asquittés.
            (Maître Lerat parlait l’Allemand et Edmond Duméril professeur et interprète de la Préfecture).
            Un très bon bouquin : « Nantes – les 50 otages » de Dominique Bloyet et Etienne Gasche.

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